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08/06/2020
L'interview bleue : Ludovic Castard
A 37 ans, après 17 années professionnelles et 91 sélections en équipe de France, Ludovic Castard a décidé de mettre un terme à sa carrière à l'issue de cette saison, interrompue par le Covid-19 alors qu'il portait le maillot d'Ajaccio. L'occasion pour l'intéressé d'évoquer ses souvenirs en club et en Bleu.
Comment as-tu décidé de mettre un terme à ta carrière et cette décision a-t-elle été difficile à prendre ?
Depuis ma dernière blessure, à l’époque où Tours m’avait repris (en 2016), je savais que ça allait être compliqué de revenir au très haut niveau, je l’ai quand même fait parce que j’adorais le volley et que j’avais reçu une belle proposition de deux ans d’Ajaccio, avec de belles ambitions sportives, j'ai ensuite à chaque fois resigné un an, mais petit à petit, je sentais qu’avec l’âge, la fin de carrière arrivait, j’ai donc eu le temps de réfléchir et de mûrir cette décision. Fred (Ferrandez, l’entraîneur d’Ajaccio) m’a demandé de prolonger une année supplémentaire, mais j’ai dit non. Il y a aussi le choix de la famille qui est entré en ligne de compte : ma femme reprend ses études, elle a obtenu le concours d’infirmière, pour elle et pour les enfants, ce n’est pas facile d’être tout le temps à droite à gauche, surtout quand tu es un peu isolé, comme chez nous, en Corse, sans compter la coupe d’Europe, même s’il n’y en aura pas l’année prochaine… Tout ça a fait que j’ai décidé d’arrêter maintenant, je suis juste un peu déçu par la façon dont ça se termine, avec le Covid qui nous a empêchés d’aller au bout de cette dernière saison.

Tu avais commencé à t’occuper cette saison de préparation physique aux côtés du staff, vas-tu continuer ?
J’ai obtenu mon BP il y a un an et demi, les dirigeants m’ont fait confiance pour m’occuper de la préparation tout en étant joueur, ça a été compliqué, mais ça s’est quand même bien passé. Pour cette saison, on est en discussion avec le club. Ce qui est sûr, c’est que je veux aussi en parallèle passer mes diplômes d’entraîneur via les modules de la Fédération, j’aimerais rester dans le milieu du sport et particulièrement du volley, aider les jeunes en devenir à progresser…

Aurais-tu imaginé, quand tu étais adolescent, faire une telle carrière dans le sport de haut niveau et que t’a-t-elle apporté ?
Je ne réfléchissais pas trop à ça, ce qui me faisait plaisir, déjà très jeune, quand je jouais à Asnières, c’était la compétition et les voyages. Même un petit déplacement en France, j’étais content, je sortais de la banlieue parisienne (il est né à Clichy, dans les Hauts-de-Seine). Donc tous ces voyages restent de très bons souvenirs, sans le volley, je n’aurais pas voyagé autant, je ne compte pas le nombre de pays que j’ai faits… Et même si on ne restait jamais très longtemps, on avait toujours quelques heures pour aller visiter un peu, ça m’a beaucoup plu. Sur le moment, tu ne t’en rends pas forcément très compte, mais au fur et à mesure que ta carrière avance, tu te dis qu’on a quand même beaucoup de chances de vivre ça. Après, je suis content d’avoir réussi à me relever de mes deux gros pépins physiques (rupture du tendon d’Achille), avec à chaque fois neuf mois d’arrêt, même s’ils me restent un peu en travers de la gorge, car les deux fois, les sélectionneurs, Philippe Blain la première, Laurent Tillie la seconde, m’avaient rappelé en équipe de France. On va dire que ce sont les deux gros regrets de ma carrière : j’étais à chaque fois revenu à un niveau pour rejouer en équipe de France et je me suis blessé. Mais ça fait partie du sport, c’est comme ça…

Tu as connu de nombreux clubs, quels sont tes meilleurs souvenirs ?
Tout d’abord Sète, le club qui m’a lancé en pro. Je me souviens de mon premier match : malheureusement pour lui, Junot Mistoco s’était blessé, je rentre en jeu à la pointe sur un match où on est menés 2-0, et on gagne 3-2. A l’époque, l’entraîneur (Josef Smolka) ne faisait pas trop confiance aux jeunes, mais il n’avait pas trop eu le choix, j’avais fait un très bon match et ça a lancé ma carrière. Après, je me souviens de la finale du Championnat en 2005 qu’on perd contre Cannes alors qu’on a sept balles de match, on avait une grosse équipe avec Junot Mistoco, Rafa Redwitz, Petr Konecny, c’était à la fois un bon et un mauvais souvenir. Derrière, j’ai signé à Paris où j’ai gagné deux titres d’affilée avec le grand Jiri Novak, ça fait clairement partie de mes meilleurs moments.

Il y a aussi eu des expériences à l’étranger, quels souvenirs en gardes-tu ?
La première avait été très courte, en Grèce. Par l’intermédiaire de Guillaume Samica, j’étais entré en contact avec le Panathinaïkos, mais quand je suis arrivé là-bas, c’était la crise, c’était vraiment compliqué financièrement, si bien que je ne suis resté qu’un mois. J’ai ensuite eu la chance via les contacts avec les Français de l’étranger, en particulier avec Xavier Kapfer, qui y jouait, de me retrouver en Pologne, à Kielce, où je me suis malheureusement blessé. Il y a ensuite eu Molfetta en Italie, après ma saison à Montpellier, j’en garde un très bon souvenir, puisque le club montait en A1, j’aurais pu y jouer, mais j’avais déjà signé à Cannes. J’avais beaucoup aimé l’atmosphère là-bas, même en A2, il y avait la ferveur du public, mais aussi du niveau, ça vivait volley à fond. J’ai aussi été au Qatar un été avec le Cubain Salvador Hidalgo, devenu un très bon ami, il y avait aussi Philippe Barca-Cysique, c’était une expérience très enrichissante.

Et  l’équipe de France... on imagine que là encore, la boîte à souvenirs est bien remplie ?
Oui, j’ai commencé tôt en équipe de France, on a été vice-champions d’Europe juniors en 2002, j’avais été élu MVP du tournoi, on avait perdu de peu contre l’Italie qui avait une très belle équipe. En A, le sommet, c’était la Ligue Mondiale 2006, j’en parlais encore il y a peu avec Jeff Exiga et Pierre Pujol, on avait un super groupe, mélange de jeunes et de moins jeunes, on a fait un super tournoi, on mène 2-0 en finale contre la légendaire équipe du Brésil, et finalement, on tombe sur un Giba extraordinaire qui doit terminer à plus de 40 points sur ce match… On était très déçus, mais ça reste mon meilleur souvenir en équipe de France.

Quels sont les entraîneurs et les joueurs qui ont compté pour toi pendant cette carrière ?
Il y en a beaucoup ! Les entraîneurs, Hervé Le Pajolec et Nicolas Lemeur qui m’ont entraîné à Asnières, ensuite Patrick Duflos qui m’a permis de progresser petit à petit, Mauricio Paes qui nous a fait gagner à Paris, Philippe Blain, un très bon technicien, Laurent Tillie, André Patin quand j’étais jeune… Pour ce qui est des joueurs, je me suis fait plein d’amis, Jeff Exiga, Pierre Pujol, Guillaume Samica, Gérald Hardy-Dessources, Fodé Keita, Yannick Bazin…

Ressens-tu de la fierté au regard de cette carrière ?
Oui, il y a un peu de fierté, parce que c’est quand même satisfaisant d’être parvenu à rester au haut niveau pendant autant de temps, j’ai toujours joué en première division, sauf en Italie. Je suis aussi satisfait d’avoir gagné quelques titres, je l’aurais un peu mauvaise d’avoir terminé ma carrière sans un titre ! Je suis content de cette belle carrière, même si, comme le dit Pierre Pujol, j’aurais pu continuer encore quelques années (Sourire)… Je vais continuer à jouer à un petit niveau, ne serait-ce que pour m’entretenir, mais je laisse maintenant la place aux jeunes.