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19/10/2017
Que sont-ils devenus ? Jean-François Toussaint
Suite de notre série consacrée aux anciens internationaux avec Jean-François Toussaint : né en 1963, champion de France en 1984 et joueur de l’équipe de France de 1982 à 1984, ce dernier est devenu par la suite cardiologue de renom et directeur de l’IRMES (Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport), à l’INSEP.
Comment le volley est-il entré dans votre vie ?
Après avoir fait de l’aviron et du judo, j’ai découvert le volley à l’âge de 17 ans sur la plage à Dunkerque, j’ai tout de suite pris du plaisir à pratiquer ce sport collectif et dynamique et à jouer en compétition, avec des résultats assez rapides, puisque nous avons été champions de France ASSU en 1980 avec mon lycée. Le hasard a ensuite fait que Michel Genson, qui était entraîneur de l’équipe de France juniors, est passé voir des amis à Dunkerque, il est venu assister à l’entraînement, la taille (2 mètres) du joueur que j’étais, même tout récent sur le plan technique, lui a paru intéressante à tester dans le cadre de l’équipe juniors de l’époque que j’ai alors intégrée.

Etes-vous resté jouer à Dunkerque ?
Non, je suis parti à Paris en 1980 pour faire Math Sup au Lycée Louis-Le-Grand. Je me suis alors inscrit au Racing où j’ai joué deux saisons, nous avons été champion de Nationale 2 en 1982. J’ai ensuite joué plusieurs saisons à Asnières, avec en point d’orgue le titre de champion de France et la Coupe de France en 1984. Je garde aussi le souvenir d’un parcours en Coupe d’Europe avec une qualification pour le tournoi final à quatre qui avait été assez unique. Je jouais à un poste de réceptionneur-attaquant et de contreur central, il y avait à l’époque un peu moins de différences que maintenant entre ces deux postes. Autour de moi, il y avait Eric Ngapeth, Stéphane Faure, Pierre Bezault, Hervé Mazzon… une belle équipe et une ambiance extraordinaire.

Viviez-vous du volley ?
Non, pas du tout. J’avais un tout petit appartement mis à disposition par le club et une indemnité d’environ 1500 francs de l’époque, ça reviendrait à 1000 euros d’aujourd’hui. C’était une aide bienvenue pour l’étudiant que j’étais, je n’avais pas besoin de mes parents pour m’aider.

Comment avez-vous été amené à jouer en équipe de France ?

C’est arrivé d’abord via l’équipe de France juniors, Guy Di Giantommaso et Marc Rousselin (qui jouait à l’époque au Racing), s’occupaient de l’entraînement, à Villeneuve lez Avignon sous la houlette de Michel Genson. Dans l’équipe : Laurent Tillie, Jean-Marc Jurkowitz, Vincent Kieffer, les frères Olivier et Philippe Rossard. Nous avions préparé le Championnat d’Europe juniors 1982 avec un système totalement inédit et extrêmement original de déplacement des postes : à la réception, les avants partaient de l’arrière pour laisser croire à de fausses prises d’appel, c’était très innovant à une époque où les arrières n’attaquaient pas encore aux trois mètres. Mais tout le système s’est écroulé trois jours avant le début du tournoi quand Laurent s’est cassé le doigt à l’entrainement, si bien que nous avons eu quelques déboires. Nous faisions pourtant jeu égal avec l’Allemagne de l’Ouest qui se hissera en finale, battue par l’invincible URSS. Ensuite, je fais deux ans en équipe de France A, de 1982 à 1984 avec, entre autres, un premier tournoi pour l’inauguration de Bercy en 1984. Vient alors le début de la préparation au Championnat du monde en 1986 en France. Le groupe se constitue alors sur Montpellier avec un grand changement de nos habitudes de vie. J’ai deux options : soit me consacrer uniquement au volley, avec le risque de ne pas jouer voire de ne pas être retenu pour le Championnat du monde (j’étais environ le 10e joueur national et ne faisais pas partie du six majeur), soit préparer l’internat. J’ai opté pour les études et j’ai quitté le collectif. J’ai dû être le plus jeune ex-international français !

Avez-vous tout arrêté à ce moment-là ?
Non, j’ai continué au Stade Français, puis au PUC, j’ai également joué en équipe de France Universitaire, j’ai notamment disputé des Championnats du monde à Edmonton et un tournoi à Berlin-Est en 1987 avec Cuba, la Corée du Sud et l’Allemagne de l’Est. J’ai arrêté cette année-là, pour la dernière année de préparation à l’internat, j’avais 24 ans.

Quelles ont été ensuite les grandes étapes de votre carrière professionnelle ?

Je réussis l’internat en 1988, que j’ai préparé avec celle qui deviendra un an plus tard mon épouse. Nous partons ensuite aux Etats-Unis ensemble, Sophie en pédiatrie, moi en cardiologie, nous avons la chance de décrocher tous les deux une bourse à Harvard pour travailler pendant deux ans sur des thèmes nouveaux, en particulier l’imagerie de résonance magnétique (IRM). J’ai donc eu à la fois une formation clinique et une formation de recherche. Nous sommes revenus en France en 1995 avec deux enfants nés aux Etats-Unis, nous en aurons un troisième à notre retour. A ce moment, j’intègre un circuit « classique » hospitalo-universitaire à l’hôpital Broussais puis à l’hôpital Georges-Pompidou, avec une ouverture sur les questions de recherche dans le domaine de l’exploration non-invasive (une imagerie qui n’a pas besoin « d’ouvrir » l’organisme pour comprendre les pathologies). Ce qui permettra de développer la compréhension du fonctionnement cérébral et de faire faire un bond extraordinaire à la neuro-physiologie. Ces techniques, je les ai ensuite introduites dans le domaine cardio-vasculaire pour essayer d’anticiper la survenue des infarctus, par exemple. Après, à partir de la détection par l’image, j’ai ouvert un volet de prévention qui me conduira à organiser les Etats Généraux de la Prévention avec le ministre de la Santé de l’époque, Xavier Bertrand. Puis, nous avons mené une réflexion importante avec le ministre des Sports, Jean-François Lamour, autour de la compréhension du paysage sanitaire dans le contexte sportif de haut niveau. La question que nous posions à ce moment était : est-ce que la pratique du sport de haut niveau est favorable ou défavorable à la qualité et à la durée de vie ? Au bout de dix ans de travaux, nous arrivons à une réponse positive : elle est favorable. Sur l’ensemble de l’ère olympique, depuis la première olympiade en 1896, la démonstration apportée par nos équipes de l’IRMES a prouvé que la pratique du sport de haut niveau ne réduisait pas l’espérance de vie mais l’augmentait au contraire de six ou sept ans. C’est l’une des conclusions les plus importantes que nous avons pu déduire de nos études.

Quand avez-vous créé l’IRMES ?

En 2006 avec déjà, à l’époque, une candidature olympique en gestation pour Paris 2012. Deux outils seront alors créés : le Vélodrome de Saint-Quentin et l’IRMES, ce sont les deux instruments qui demeurent de cette candidature dans le paysage sportif français. Maintenant que nous sommes assurés d’accueillir les Jeux Olympiques en 2024, nous repartons sur toute une série de réflexions, de projets autour de l’héritage. J’ai eu la chance de participer à la candidature de Paris autour de ces questions au sein du comité Sport et Société. Le postulat de départ est de se dire que les Jeux de Paris seront un très grand succès s’il y a non seulement un engouement autour des compétitions sportives, mais si nous pouvons aussi montrer dix ans après, en 2034, que toutes ces actions ont conduit plus de Français à une meilleure qualité de vie grâce à l’intégration d’une activité physique et sportive dans leur quotidien.

Etes-vous resté proche du monde du volley ?
Oui, j’ai toujours suivi l’équipe de France. En 1986, bien sûr malgré cette énorme déception de manquer les demi-finales. Il faudra attendre vingt ans pour voir la génération suivante, celle de Frantz Granvorka, remporter une première médaille internationale, et encore dix ans, pour confirmer ce très beau parcours grâce à l’équipe actuelle qui a encore cette année montré sa capacité à monter au plus haut niveau, mais aussi l’immense difficulté de se maintenir sur quatre compétitions internationales au cours d’un seul été. Je suis beaucoup l’équipe de France encore aujourd’hui, d’abord parce que Laurent est en charge de l’Équipe, ensuite parce qu’on retrouve dans cette équipe les N’Gapeth, Rossard, Tillie, Clévenot, Patry… des noms qui constituaient déjà notre collectif via leurs parents ! On se rend compte, et ce n’est pas propre au volley, que les enfants d’anciens champions sont de plus en plus nombreux dans le très haut niveau dans tous les pays, pour deux raisons : des prédispositions génétiques et des avantages culturels, avec des enfants qui ont baigné très tôt dans le monde du sport, ont eu des repères visuels, sonores, olfactifs très précoces. Je me souviens notamment de Kim Tillie qui était au bord des terrains, à même pas un an, déjà baigné dans l’ambiance sportive de ses parents.

Avez-vous continué à jouer au volley et à faire du sport ?
J'ai pratiqué la natation et le tennis; j'ai aussi découvert en famille le parapente et le deltaplane et je joue encore au volley une fois par an, lors d'un tournoi que nous organisons avec les joueurs avec qui nous avons été vice-champions de France universitaires en 1986. Nous étions alors sous la conduite d'un coach passionné et passionnant, Paul Alart, décédé il y a deux ans. Ce tournoi a désormais lieu en son honneur et celui de cette année se tiendra justement jeudi prochain à Paris.